......A 7h45 nous partons, le temps est splendide, sans un nuage, au loin le Cho Yu brille sous le soleil levant. Nous traversons le torrent, les canards ne sont pas encore sortis et immédiatement c’est la montée, 560m sans replat. 

           Dans la montée, nous pouvons apercevoir nos yaks broutant l’herbe rase et jaunie de cette fin d’automne. Durant notre séjour à Gokyo, les yaks sont en liberté dans la montagne et de temps à autre Dassonam me demande mes jumelles afin de les surveiller.

    J’évite les arrêts près du sommet car j’ai un peu de mal à reprendre la cadence. J’arrive en vue du sommet avec François, les inévitables drapeaux de prière nous l’indiquent. Le spectacle est fantastique, sur 360°, ce ne sont que pics neigeux et cols à l’aspect redoutable, le tout dominé par la masse puissante du Cho Yu et plus bas, l’immense glacier du Langsumpa dans un éblouissant camaïeu bleuté.

Puis c’est Koumar et Francis qui apparaissent, Lolo et enfin Marie Laure aidée par Ram et Bruno.

Les appareils photos crépitent afin d’immortaliser " l’exploit ".

Et ils sont tous là, les plus hauts : Le Sagarmatha, le Cho yu, le Nupse, le Lhotse, le Pumori, le Cholatse, et même tout là bas dans le lointain le Makalu où de nombreux alpinistes français se sont distingués.

On reste sans voix, tant de beauté, d’un seul regard ; dans la nature, rien n’est laid, tout est beau, sauf parfois ce qui vient de la main de l’homme.

Allez, il faut redescendre...Comme à l’habitude la descente nous paraît interminable ; Presque en bas, un cuistot nous apporte notre apéritif habituel : un verre de citron chaud, du tang, interdit en France d’après les spécialistes en boisson sucrée , possible... mais ici il nous parait succulent.

I...l faut partir dans les premiers, aussi, lever 5h30. Il fait un froid de voleur. Après le lever et notre tasse de thé habituelle, n’ayant pas à ranger les sacs, nous allons rapidement au petit déjeuner, en silence, car le Lodge est rempli de dormeurs allongés sur les banquettes.

    A 6h30 c’est le départ vers GoraK Shep. La montée est lente au début, par un petit sentier sablonneux, puis nous attaquons la moraine et ses éboulis rocheux, montées et descentes qui me paraissent interminables, se succèdent . Gorak Shep est enfin en vue : deux lodges de part et d’autre du chemin, à leurs pieds une mer de sable, de l’autre coté un sentier montant vers le sommet convoité, et surplombant le tout, la pyramide du Pumori culminant à 7165m.

   Au départ deux équipes avaient été constituées, l’une emmenée par Dossanam se composait de Brigitte, François, Laurent et moi-même. L’autre conduite par Ram et Bruno : de Marie Laure et Francis.

    Arrivés au pied de la montée, personne n’étant en vue à l’arrière, nous décidons François et moi d’attaquer la montée sans nous refroidir. Il est 8h45, le soleil est là, peu de vent, seul un léger courant d’air traverse le couloir que forme cette étendue de sable ou le bruit du ressac et des vagues est remplacé par des claquements brefs suivis de longs chuintements du glacier voisin qui respire.

    Nous avons commencé la montée à un rythme trop rapide jusqu’au replat, ensuite la montée devenant plus raide, nous ralentissons l’allure, le cœur affolé battant aux tempes, il faut se ménager, d’autant que le sommet nous apparaît dans le lointain bien plus haut que nous l’avions pensé au départ.

   Nous dépassons dans la montée une équipe d’américains dont l’un d’entre eux, pesant au bas mot un quintal et demi, peine, transpire et stoppe tous les deux pas pour reprendre son souffle ! Quel courage ! Il est en train de suer tous ces cokes !

   Tout là haut, nous apercevons la table terminale noire de monde, nous ne serons pas les premiers, mais ceux qui nous devancent ont du coucher, à pied d’œuvre, à Gorak Shep.

     A 10h20 François arrive le premier au sommet, je touche les drapeaux à prières couronnant le sommet quelques minutes après. Une heure quarante pour grimper 400m à cette altitude, c’est honorable.

 Les premiers arrivés entamant la descente, nous pouvons nous installer royalement au sommet, le rocher sommital formant un fauteuil rembourré par les innombrables drapeaux.

Pas un souffle de vent, un soleil rayonnant, seuls quelques écharpes de cirrus nous cachent le bleu du ciel, nous pouvons admirer le spectacle prodigieux qui se présente à nos yeux. Le Sagarmatha est là devant nous, à toucher avec le col sud et tout en bas l’Ice fall . A sa gauche son épaule, le Lhola pass 6000m, le Changtse, le Khumbutse(6665) et au-dessus de nous le Pumori.

A sa droite le Lhotse(8501), et devant nous le Nuptse(7861).

Quelques 20 minutes après nous apercevons Laurent qui arrive accompagné de Dassonam portant son sac., puis c’est au tour de Francis d’apparaître accompagné de Bruno. Marie Laure et Brigitte se sont arrêtées à Gorak Shep.

Les photos sont prises tous azimuts, Bruno faillit même disparaître au pied du Kala Patthar, reculant dangereusement pour la photo, car si du coté montée la pente est relativement douce, de l’autre coté c’est un à pic vertigineux jusqu’au glacier du Changri Skar, quelque 500m en contrebas.

Puis à contre cœur nous sommes obligés de redescendre, à 12h30 nous rejoignons la mer de sable où nous nous restaurons un peu dans un lodge. A 13h45 nous reprenons la direction Lobuche pour une arrivée vers 14h45.